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Denis Cuniot plays Nano Peylet

Denis Cuniot plays Nano Peylet: 40 ans de klezmer et d'amitié

40 ans avec Nano Peylet
À partir de 1983, j’ai été l’un des principaux initiateurs du renouveau et de la reconnaissance de la musique klezmer en France en co-fondant un duo avec Nano Peylet, à l’époque clarinettiste et saxophoniste du groupe de jazz ARCANE V, puis clarinettiste de Bratsch. Dans mes "années jazz", j’avais rencontré Nano.
Dans son histoire familiale il n’avait aucun lien avec le judaisme, mais il avait rencontré au cours de ses études et dès les débuts de sa carrière tous les musiciens et chanteurs qui avaient, dans les années 70 en France, une authentique connaissance des musiques yiddish et klezmer : Eddy Shaff, Teddy Lasry, Maurice Delaistier, Youval Micenmacher, Ezra Bouzkela, Talila, Jacinta, Ben Zimet… Et il jouait dans les deux grandes formations de cette époque : Kol-Aviv et Adama.
Il avait eu comme professeur de Jazz, Philippe Gumplowicz, (guitariste d’ARCANE V) devenu ensuite professeur des universités, grand connaisseur de la culture juive ashkénaze. Nano connaissait aussi très bien Giora Feidmann et sa production discographique. Il aimait cette culture ashkénaze. Ses amis et confrères qui venaient de cet univers lui racontaient, lui en expliquaient les logiques illogiques. Auprès d’eux, il s’était constitué déjà un large répertoire de chansons et de niguns yiddish et hébraïques, de mélodies klezmer, de musiques de théâtre et de danses.
Cette rencontre aux sons du Free Jazz, rencontre amicale et musicale allait avoir la plus grande influence sur ma vie artistique puisque c’est par et grâce à Nano Peylet que me vint la révélation du klezmer.
Ce coup de foudre musical et amical m’est arrivé lorsque, sur une proposition de Nano de monter un répertoire klezmer (hassidique disions-nous à l’époque), je fis mes premières répétitions. Je compris alors au plus fort de moi que j’avais trouvé ma voie artistique, mon lieu d’inspiration et de travail permanent, ma matière quotidienne. Ce fut donc le début de mon engagement musical et militant.
Militant car en ce temps-là, personne en France ne connaissait cette musique (y compris dans la communauté juive). J’avais conscience qu’elle avait été anéantie dans les pays dont elle était issue et que nous avions la tâche et le devoir de la faire ré-entendre, revivre, de la re-créer : un devoir de mémoire, un devoir d’aujourd’hui. Mémoire d’un répertoire, d’un genre musical. Mémoire de musiciens et de poètes disparus.
Musical puisque depuis lors, près de quarante ans après, j’ai réalisé une dizaine de disques, tous édités chez Buda Musique, des musiques de films, de spectacles de théâtre, plusieurs centaines de concerts, ainsi que des conférences, exprimant sous des formes et formats divers, mon attachement et ma créativité dans l’univers klezmer et yiddish. 
Aujourd'hui, je suis heureux et ému d’apporter ma contribution aux questions que Nano Peylet nous posait au début des années 1990 :
Qu’avait été la musique traditionnelle avant de l’être devenue ?  
Comment faire du neuf avec du vieux ?
Les musiques traditionnelles sont-elles condamnées à être anciennes ?
Ne pourrait-on pas composer de la musique vieille tout de suite ?
Faire du neuf avec du vieux, du neuf avec du neuf mais aussi du vieux avec du neuf ?
Il avait ainsi mis au jour le concept de « musique pré-traditionnelle ».
Aujourd'hui, je lui ai demandé de nouveau de me composer des œuvres et de m’offrir quelques arrangements. Ce disque.

Denis Cuniot

40 ans avec Denis Cuniot
Dans les années 80, quand on était musicien et qu’on voulait faire partie de l’avant-garde, il fallait sonner
« jazz ». Un pianiste avec qui je causais beaucoup, m’a conforté dans l’idée qu’il y avait d’autres modes d’expression non encore explorés.
Un de ces modes en particulier déclenchait chez moi de grosses émotions par la simplicité et la beauté de ses mélodies, c’était la musique juive qui depuis a trouvé le nom de musique Klezmer. À l’époque, (les années 80) je faisais du free-jazz dans le groupe ARCANE V . Nous mettions toujours dans le programme de nos concerts un, souvent deux morceaux de musique traditionnelle juive. Il y avait deux raisons à cela : la première était d’ordre esthétique : passer du free au trad, retourner au free, revenir au trad, était un plaisir on pourrait dire un ravissement, sans cesse renouvelé. La deuxième était beaucoup plus intime. La moitié du groupe était d’origine juive, et restait très présente l’idée qu’il ne fallait pas que la Shoah tombe dans l’oubli un jour.
Le pianiste dont je parlais plus haut s’appelle Denis Cuniot , et nous avons fondé un duo de musique exclusivement juive, pour lequel il a fallu assez vite étant donné le peu de traces écrites du répertoire,
( tradition orale oblige), composer de la musique de concert puisqu’il n’existait plus de traditions de musiciens qui allaient de village en village avec une centaine de mélodies glanées à droite à gauche, au
hasard des rencontres.
Jouer devant un public assis et silencieux ils ne connaissaient pas. On vivait avec la musique, éventuellement on dansait, presque toujours on mangeait, on faisait du bruit, ça ne les empêchait pas de jouer. Et comme les musiciens trouvent toujours à s’adapter à de nouvelles moeurs, le monde a vu arriver la musique dans les cinémas et les brasseries puis à la télévision, dans les MJC, les centres culturels, les festivals et tout ce brassage lui a permis de se structurer autour de genres nouveaux qui ont abouti à l’éclosion de nombreuses compositions parmi lesquelles le public a pu découvrir la musique klezmer pour piano, se trouvant ainsi devant un infini de possibles qu’on aurait eu peine à imaginer vingt ou trente ans plus tôt. J’aime le piano autant que j’aime la clarinette : j’ai eu la chance de pouvoir développer sur cette dernière un phrasé issu de l’aspect oriental de la musique klezmer. À présent je poursuis cette recherche sur le piano, qui offre une palette de couleurs extraordinaire, qui me permet de développer mes idées et aussi, bien sûr m’offre en la personne de Denis Cuniot l’interprète idéal, pionnier de cet art et ami de toujours, qui est prêt à se lancer dans un travail extrêmement ardu pour coller au mieux à des partitions qui peuvent être parfois très complexes.
 
Nano Peylet

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